La réélection de Donald Trump a mis en lumière le recul de la liberté d’expression. Dans certains États américains, de nombreux ouvrages (dont certains best-sellers adorés par nos ados) ont déjà disparu des écoles et des bibliothèques publiques. Décryptage de Je bouquine, le magazine lecture de Bayard Jeunesse pour les 12-15 ans.
Censure des livres : que se passe-t-il de l’autre côté de l’Atlantique ?
Aux États-Unis, la loi n’est pas la même partout. C’est le principe de la république fédérale : chacun des 50 États possède son propre code pénal et civil. Ce qui explique pourquoi, par exemple, certains livres peuvent être censurés dans l’Arizona, et pas en Californie. L’interdiction s’étend même aux sujets abordés en classe : en Floride, plusieurs lois empêchent les profs de parler d’orientation sexuelle. Depuis que Donald Trump est revenu à la Maison Blanche en janvier 2025, la liste des banned books (livres censurés) ne cesse de s’allonger. Mais ce phénomène avait déjà commencé avant sa réélection et coïncide avec la montée en puissance d’idées conservatrices. Selon l’organisation Pen America, durant l’année scolaire 2023-2024, 10 046 livres ont été retirés des rayons des bibliothèques scolaires et des librairies. Une tendance inquiétante.
Pen America, une association qui résiste

Pen America, une association qui défend la liberté d’expression, tient un comptage des livres interdits. Enseignants et bibliothécaires ont aussi pris la parole pour dénoncer la censure. Mais s’ils refusent de retirer des titres des bibliothèques, ils sont considérés comme hors-la-loi, peuvent perdre leur emploi et être jugés en conséquence.
Des sujets jugés “inappropriés” pour des livres destinés à la jeunesse
Les censeurs (les parents d’élèves qui siègent dans les conseils d’éducation, les politiques…) scrutent les livres jeunesse. Selon eux, certains seraient “inappropriés”, “capables de pervertir la jeunesse”. Dans leur viseur : des ouvrages qui racontent l’histoire des États-Unis, dénoncent le racisme, parlent de sexualité…
Ces best-sellers devenus des banned books (livres censurés)
1984, un roman de George Orwell
L’humanité a survécu à une guerre nucléaire, mais les peuples continuent de se détruire. La Grande-Bretagne est désormais dirigée par Big Brother, leader de la pensée unique. Winston Smith, lui, rêve de rébellion…
Maus, une BD d’Art Spiegelman
Deux récits s’entremêlent dans ce roman graphique : celui du père de l’auteur, survivant de la Shoah, et celui de son fils qui a toujours eu une relation difficile avec lui…
Twilight, une saga de Stephenie Meyer
Bella, une lycéenne un peu timide, a des sentiments pour deux garçons : Edward le vampire et Jacob le loup-garou. Qui va-t-elle choisir ?



Et aussi…
Le Journal d’Anne Frank.
Le Premier qui pleure a perdu, de Sherman Alexie.
Le Meilleur des mondes, d’Aldous Huxley.
Les Hauts de Hurlevent, d’Emily Brontë.
Freckleface Strawberry, de Julianne Moore.
Des souris et des hommes, de John Steinbeck.
L’œil le plus bleu, de Toni Morrison.
Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, de Harper Lee.
L’Attrape-cœurs, de J.D. Salinger… et des milliers d’autres titres…
Un autodafé, c’est quoi ?
C’est l’action de détruire par le feu des livres jugés dangereux, lors d’une cérémonie publique. Au Moyen Âge, à partir du XIIIe siècle en France, une personne devait prouver sa foi catholique à l’occasion d’un auto da fe. Si elle échouait, elle était brûlée vive. Les nazis ont repris cette idée de “purification par les flammes”. Le 10 mai 1933, ils ont détruit plus de 25 000 livres ! D’autres autodafés ont été organisés depuis : en 1973, sous la dictature de Pinochet au Chili ; en 2002, sous le régime des talibans en Afghanistan… En 2022, dans le Tennessee, le pasteur Greg Locke a organisé un autodafé de livres qu’il jugeait “maléfiques”. Parmi eux, tous les Harry Potter et les Twilight !
“Des milliers de livres interdits aux États-Unis”, article extrait du magazine Je bouquine n° 496, juin 2025. Texte : Laureline Dubuy.
