Deepol/Plainpicture. Okapi n°1105, 1er février 2020.
© Deepol/Plainpicture. Okapi n°1105, 1er février 2020.

Qui a inventé l’adolescence  ?

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Ruptures, changements, découvertes… Crise ? Être adolescente(e), qu’est-ce que cela signifie, vraiment ? Est-ce la même chose partout, et depuis toujours ? À quel âge devient-on adulte ? Le magazine Okapi répond à ces questions dans son numéro du 1er février ! À lire en famille…

Adolescent, ça veut dire quoi exactement ?

Le mot vient du latin “adulescens”, qui signifie “celui qui est en train de croître”. Au fil du temps, ce terme, hérité de la Rome antique, a fait l’objet d’usages très différents. Au Moyen Âge, par exemple, il était synonyme de “novice un peu niais”, quasiment de morveux. Pas très flatteur ! Aujourd’hui, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit l’adolescence comme une “période de croissance et de développement humain entre l’enfance et l’âge adulte”.

Les ados ont-ils toujours existé ?

L’adolescence, telle que nous la connaissons dans le monde où nous vivons, est une notion extrêmement récente ! Pendant très longtemps, on était soit enfant, soit adulte. Il n’y avait rien entre les deux. On passait directement d’un âge à l’autre. D’abord, l’espérance de vie était beaucoup plus courte. Les enfants n’allaient pas ou peu à l’école. Ils travaillaient le plus tôt possible pour aider leur famille. Avec les progrès de l’hygiène et de la médecine – donc l’allongement de la vie – mais aussi la généralisation de l’instruction obligatoire au 19e siècle, un nouvel âge est né ! Comme une période de transition vers la maturité.

A-t-il toujours été question de “passage” ?

Oui, depuis les temps les plus anciens et dans les sociétés traditionnelles, la fin de l’enfance est marquée par des rites d’initiation. Pendant l’Antiquité, les jeunes Spartiates ou neio étaient emmenés en dehors de la cité. Ils devaient survivre ainsi, sans protection ni nourriture, armés d’un seul poignard. Puis ils rentraient une fois devenus symboliquement adultes ! De nos jours, sur l’île de Pentecôte, il faut encore sauter d’une tour de 25 mètres de haut avec une liane attachée à chaque cheville… Sacré défi !

“Qui a inventé l'adolescence ?”, Okapi n°1105, 1er février 2020. Texte : Amélia Morghadi. Illustrations : Manu Boisteau.

Et pour les ados d’aujourd’hui ?

L’adolescence reste la période où l’être humain se développe le plus ! Et le plus vite ! En plus de gagner des centimètres, le corps change. C’est la puberté. Les transformations ne sont pas seulement physiques, avec la découverte de la sexualité. Elles s’opèrent dans les têtes, provoquant des humeurs instables. On passe du rire aux larmes en quelques secondes. On est énervé, fatigué. On s’émancipe, on s’oppose. On veut avoir son mot à dire et on compte bien se faire entendre, “seul(e) face au monde” ! Les goûts s’affinent. Gagner en indépendance permet de construire sa personnalité en affrontant des épreuves et des risques qui font grandir. Françoise Dolto, qui travailla longtemps sur ces questions en tant que pédiatre et psychanalyste (la référence !), parle d’une “phase de mutation aussi capitale que sont la naissance pour le petit enfant et les quinze premiers jours de la vie.” (La cause des adolescents, Françoise Dolto, chez Pocket.)

Pourquoi parle-t-on d’une génération ado ?

Un look, des musiques, une façon de parler, des références partagées… Être ado, c’est aussi partager un tas de codes qui étonnent, bousculent, voire dérangent l’ensemble de la société ! (L’adolescence n’existe pas, Patrice Huerre, Martine Pagan-Reymond, Jean-Michel Reymond, éd. Odile Jacob.) Le phénomène d’une culture commune aux “teenagers”, comme on les appelle dans les pays anglo-saxons, s’est affirmé dans les années 1950 avec l’arrivée du rock’n’roll ! Cette génération en jean et cuir se voulait rebelle, en rupture avec le vieux monde. Et cela continue aujourd’hui : à l’adolescence, tout est bon pour montrer que l’on est désormais différents. Le rap, les dernières vidéos YouTube ou les sneakers collent à la peau des ados partout où ils sont !

Est-ce partout pareil ?

Non ! On estime à 1,2 milliard le nombre des 10-19 ans vivant dans le monde, de nos jours. Soit la génération adolescente la plus nombreuse de l’histoire de l’humanité, correspondant à près de 20 % de la population mondiale ! Mais tous les pays ne sont pas logés à la même enseigne. Loin de là ! Très loin de nos préoccupations, la pauvreté, la guerre ou encore les mariages précoces obligent des milliers de (très) jeunes garçons et filles à assumer un rôle d’adulte. En Égypte, un tiers des ados travaillent. Pour eux, l’adolescence n’existe pas en tant qu’étape à part entière !

Et l’adolescence, ça dure longtemps ?

C’est flou. Chez nous, certains fixent la fin de cet “entre deux âges” à la majorité légale, c’est-à-dire 18 ans. Pour d’autres, on cesse d’être ado quand on finit ses études, qu’on obtient son premier emploi, qu’on emménage dans son propre appartement et quand on devient financièrement indépendant ! Alors, oui, ça peut durer longtemps ! Selon cette logique, celle de l’Unicef qui englobe la préadolescence et la post-adolescence, on serait ado de 10 à 24 ans ! Mais une fois encore, la durée de cette transition vers l’âge adulte varie selon les lieux et les cultures : de quelques années à peine dans les pays pauvres à une décennie dans les pays riches.

“Qui a inventé l'adolescence ?”, Okapi n°1105, 1er février 2020. Texte : Amélia Morghadi. Illustrations : Manu Boisteau.

L’adolescence en chiffres

24,1 %
Presque 1 personne sur 4 en France a moins de 19 ans ! Source : Insee, estimations de population (données provisoires arrêtées fin 2018).

18 ans
C’est l’âge auquel le cortex préfontal, la partie du cerveau qui permet d’acquérir des connaissances, arrive à maturité  ! Source : OMS.

15 ou 21 ?
En Arabie Saoudite, on devient officiellement adulte à 15 ans… là où il faut attendre 21 ans au Honduras !

“Qui a inventé l’adolescence ?”, Okapi n°1105, 1er février 2020. Texte : Amélia Morghadi. Illustrations : Manu Boisteau. Photo : Deepol/Plainpicture.

Sommaire du magazine Okapi, n°1105, du 1er février 2020.