© Photos d’ados : Patrice Eglin. Okapi n° 1224.

Premières libertés : mode d’emploi pour les ados… et leurs parents

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Sortir avec ses amis, avoir de l’argent de poche, organiser une fête, sinscrire sur les réseaux sociaux, rester seul(e) à la maison… Votre enfant grandit, et ses envies de liberté aussi ! Pour faciliter le dialogue, Okapi, le magazine Bayard Jeunesse des collégien(ne)s, lui donne des conseils pratiques sur ce quil faut faire, ou absolument éviter, quand on veut convaincre des parents parfois un peu stressés. Une base précieuse qui vous aidera à définir ensemble les limites à ne pas dépasser.

L’année scolaire se termine et, quel que soit le niveau scolaire avec lequel ils en ont fini, nos ados collégiennes et collégiens expriment leur immense soulagement ! Fini, jusqu’en septembre, le drame des devoirs du soir et le stress de la révision de dernière minute. Au rencard les réveils qui piquent les yeux et les journées de cours interminables !
À la place, un grand bonheur les envahit. Et, autant le savoir, un intense sentiment de liberté qui, parfois, pourra se transformer en revendication exprimée en mode « je veux, j’exige », un peu maladroit. Quelques exemples : « Je veux sortir avec mes potes », « J’ai besoin de plus d’argent de poche », « J’ai envie d’inviter qui je veux et d’organiser une fête », ou encore « Pas besoin de baby-sitter si vous sortez, je me débrouille tout(e) seul(e). »

Un indispensable besoin d’autonomie

Pour les parents, cette étape peut être déroutante : elle oblige à prendre en considération un fait soudain inéluctable : oui, notre enfant a grandi ! Mieux, il ou elle commence à envisager de faire des choses « de grand » en se passant de vous ! Sans aller jusqu’à une émancipation pure et simple, le (la) voilà qui revendique son besoin de plus d’autonomie. Quitte à dépasser les bornes. « C’est un âge où l’on a besoin de tester des choses, de faire ses propres expériences, et même dans une certaine mesure de réaliser des erreurs pour apprendre à se projeter dans l’avenir », explicite, dans Okapi, la psychologue Aline Nativel Id Hammou.

Déroutante ou pas, cette nouvelle donne n’en constitue pas moins une bonne nouvelle pour les parents. D’abord, que ce sentiment de liberté chez nos rejetons s’accompagne d’envies de faire des choses. Cela signifie que le syndrome du « j’sais pas quoi faire » ne le (la) guette pas, en tout cas pas tout de suite. Donc réjouissons-nous… même si, c’est vrai, s’y ajoutent inéluctablement d’autres revendications peut-être plus difficiles à accepter : « J’ai 13 ans maintenant, est-ce que vous me laissez aller sur les réseaux ? » ou « Tu me donnes plus de temps de console ? »…

Parler avec ses parents d’autonomie : les conseils d’Okapi

On le voit, la liberté peut ouvrir bien des portes. À votre ado de savoir s’y prendre pour vous le demander comme il faut. Et bien gérer ensuite… Voilà pourquoi Okapi choisit de passer à la loupe ce moment où il faut « en parler » aux parents. Un temps obligatoire (sauf si les parents ont pris les devants) et pas forcément simple. Souvenons-nous de notre adolescence !

Dans Okapi, les conseils pleuvent, avec humour : ce qu’il faut faire pour un maximum de réussite, et aussi ce qu’il faut éviter, faute de quoi c’est l’échec garanti ! Bref, un vrai mode d’emploi des premières libertés, accompagné de recommandations, prodiguées par des ados plus âgé(e)s à qui notre journaliste a demandé un « retour d’expérience ». « Quand je suis sorti avec des amis, j’ai tout de suite rassuré mes parents en leur envoyant un message pour dire que j’étais arrivé à l’endroit prévu », raconte Paul, 13 ans. « Le deal avec mes parents, c’était de faire une fête tous les deux ans, et de ne pas inviter trop de monde », témoigne Jade, 15 ans.

C’est sûr, ça passe mieux quand le conseil vient d’autres ados ! Ce qui n’empêche pas Okapi d’en prodiguer un ultime, précieux, par la voix de la psychologue Aline Nativel Id Hammou, spécialiste du lien parent-enfant : « Beaucoup de parents attendent de la reconnaissance. Alors, il faut penser à les remercier, à les valoriser, leur dire que tu les aimes… Ils doivent sentir qu’ils restent importants pour toi »… C’est dit !

Jean-Yves Dana, rédacteur en chef d’Okapi

Couverture du magazine Okapi n°1224, 15 juin 2025.

Couverture du magazine Okapi n°1224, 15 juin 2025.

« Je veux plus d’argent de poche »

Plus d'argent de poche à l'adolescence ? Les conseils du magazine Okapi.

Les super tips

👌 Dire à mes parents ce que j’achète
Quand tu demandes de l’argent à tes parents, explique-leur pourquoi tu en as besoin. Comme ça, ils verront que ce n’est pas un caprice
et que ta demande est réfléchie.
👌 Gagner mon argent
La technique précédente n’a pas marché ? Pas de panique, propose à tes parents de le gagner en participant activement aux tâches ménagères ou autres (tondre la pelouse, mettre ou débarrasser la table, vider le lave-vaisselle, passer l’aspirateur…).
👌 Économiser pour un gros achat
Plutôt que de faire le plein de bonbons chaque fois que tu as un peu d’argent, mets-le de côté pour t’offrir les baskets ou le jeu de tes rêves. Tu seras encore plus content(e) d’en profiter !

Les tips nuls

👎 Voler des billets dans le sac de mes parents
Puisqu’ils ne veulent pas te donner de l’argent, ça te semble une technique toute trouvée pour en avoir un peu quand même…
👎 Acheter sans réfléchir
Oh, une promo sur les stylos Legami ! Tu n’en as pas vraiment besoin, mais tu trouves ça super marrant.
👎 Tout dépenser
Tu n’auras plus d’argent pour le reste du mois, mais pas grave, tu pourras toujours essayer d’en redemander.

Le super conseil de Coline, 15 ans
« Au début du collège, j’avais 2 € par mois. Ça augmentait un peu chaque année. Avant de dépenser mon argent, quand un jouet me faisait envie, par exemple, je me posais toujours une question : est-ce que ça va vraiment m’être utile pour plus tard ? Bien sûr, il faut aussi savoir se faire plaisir de temps en temps ! »

« Je veux sortir avec mes potes ! »

Sorties entre ami(e)s à l'adolescence : quelles respecter pour rassurer ses parents ?

Les astuces top

👌 Informer mes parents
Avant de sortir, demande-leur toujours la permission et dis-leur où tu comptes aller et avec qui. Plus la sortie est organisée, plus il y a de chances qu’ils acceptent.
👌 Sortir avec des personnes de confiance
Pour rassurer tes parents, essaye toujours de sortir avec au moins une personne qu’ils connaissent. Ou bien propose à ta grande sœur/ton grand frère de vous accompagner.
👌 Être prudent(e)
Pense à respecter les règles de sécurité (regarder quand tu traverses, ne pas parler à des inconnus…) et à faire attention à tes affaires, pour que tes parents continuent de te faire confiance.

Les idées pourries

👎 Sortir tous les jours
Aller au ciné ou au parc avec tes potes, c’est génial, alors autant le faire le plus possible !
👎 Ignorer les appels
Mets ton tel en sourdine pour être sûr(e) de ne pas être dérangé(e) par tes parents, qui s’inquiètent de savoir si tout se passe bien.
👎 Rentrer super tard
Tu devais être de retour à 20 h, mais tu t’amuses tellement… Rentrer à 21  h 30, ce n’est pas si grave, non ?

Le super conseil de Paul, 13 ans
« En milieu de 6e, j’ai eu le droit pour la première fois de sortir avec des amis. Au début, mes parents n’étaient pas trop d’accord, mais je leur ai promis que ça se passerait bien. Je leur envoie toujours un message quand je suis arrivé à l’endroit prévu et quand je suis rentré à la maison. »

« Je veux organiser ma première fête »

Que dire à un(e) adolescent(e) qui veut organiser sa première fête ?

À faire

👌 Expliquer mon programme à mes parents
C’est important que vous soyez d’accord, eux et toi, sur le type de fête (goûter, boum, pyjama party…), pour voir si c’est réalisable chez vous et, si besoin, trouver un compromis.
👌 Préparer des activités
Pour éviter que tes potes s’ennuient et se mettent à courir partout, organise bien les choses pour un minimum de temps morts : blind-tests, jeux en tout genre, épreuves sportives…
👌 Faire un grand ménage
Après ta fête, pas question de laisser ta maison en bazar ! Prends le temps de bien ranger, et aussi de remercier tes parents pour t’avoir fait confiance.

À ne pas faire

👎 Inviter toute ma classe
Plus on est de fous, plus on rit ! Tu distribues des invitations à chaque personne que tu croises, ça va être LA fête de l’année.
👎 Laisser mes parents tout organiser
Acheter de quoi boire et grignoter, décorer la maison… Trop la flemme, tu laisses tes parents gérer tout ça.
👎 Virer mes parents
Pas question qu’ils vous surveillent ! Ta fête sera garantie 100 % sans adultes, c’est non négociable.

Le super conseil de Jade, 15 ans
« J’ai déjà organisé des fêtes pour mon anniversaire. Le deal avec mes parents, c’était qu’on en faisait une tous les deux ans. Je n’invitais pas beaucoup de monde. Pour que ça se passe bien, c’est important de choisir les bonnes personnes, des ami(e)s de qui on est vraiment proche. »

« Je veux rester seul(e) à la maison »

Votre enfant veut à rester seul(e) à la maison ? Les conseils d'Okapi pour les ados… et les parents.

100  % réussite

👌 Faire mes devoirs
C’est une occasion en or pour prouver à tes parents que tu es responsable et autonome, surtout s’ils t’ont demandé de les faire avant de s’en aller.
👌 Ne pas utiliser d’objets dangereux
Pour éviter tout accident, ne te sers pas du gaz, du four ou des grands couteaux de cuisine.
👌 Savoir comment réagir en cas d’urgence
Si tu as le moindre problème, n’hésite pas à appeler tes parents ou tes voisin(e)s. Tu peux même afficher les numéros d’urgence (pompier, Samu…) sur ton frigo.

100  % échec

👎 Inviter mes potes
À peine tes parents partis, dégaine ton téléphone pour convier tous tes ami(e)s. Sans adultes à l’horizon, vous allez bien vous amuser.
👎 Fouiller dans les affaires de mes parents
Profite du fait qu’ils ne sont pas là pour aller dans leur chambre, ouvrir les tiroirs qui te sont interdits… Tu trouveras peut-être des choses intéressantes !
👎 Ouvrir la porte à n’importe qui
Pas la peine d’être vigilant(e), ça ne craint rien ! D’ailleurs, pourquoi ne pas la laisser ouverte ?

Le super conseil de Jade, 14 ans
« Au début, ce qui rassurait mes parents, c’était de savoir qu’ils pouvaient me joindre sur le fixe de la maison et que mes voisins n’étaient pas loin. Avec le temps, ils s’inquiètent de moins en moins, ils ont vu que j’étais capable de rester seule. J’aime bien regarder la télé ou lire plutôt que de rester dans le silence, c’est moins stressant. »

« J’aimerais passer plus de temps sur mon tel ou sur ma console »

Comment demander à ses parents de passer plus de temps sur son téléphone ou sa console quand on est adolescent ?

Ça, c’est oui

👌 Établir un contrat
Avec tes parents, écrivez des règles sur l’utilisation des écrans, valables pour toute la famille, et affichez-les dans votre salon. Chacun(e) devra les respecter sous peine de mettre une pièce dans une tirelire commune.
👌 Garder du temps hors connexion
Passer plus de temps sur ton portable, ça peut se discuter. Mais ça ne doit pas se faire au détriment d’autres activités : voir tes potes, faire du sport, lire une BD ou un roman, jouer sans écran, et bien sûr terminer tes devoirs…
👌 Mettre un minuteur
Ça t’évitera de passer l’après-midi entier sur ton tel ou ta console sans même t’en rendre compte, car le temps file quand on joue ou qu’on regarde des vidéos. Et quand ça sonne, on arrête !

Ça, c’est non

👎 Se cacher pour l’utiliser
Tapi(e) dans ta cabane au fond du jardin avec ta console portable ou ton smartphone, c’est le meilleur moyen pour jouer ou scroller pendant des heures sans te faire gronder.
👎 L’emmener partout
Ton écran préféré t’accompagne aux repas de famille, aux toilettes et même jusque sous la douche. Impossible de t’en détacher puisque c’est ton meilleur ami. Comment ça, tu es accro ?
👎 Ne communiquer que par SMS
Tu ne prends même plus la peine de sortir de ta chambre pour demander à tes parents quand on mange ou s’il y a besoin de mettre la table. C’est tellement plus pratique s’ils t’envoient un texto quand le repas est prêt.

Le super conseil de Marius, 14 ans
« Quand j’ai eu mon premier téléphone, en 6e, j’avais un contrôle parental. Cette appli, qui s’appelait Xooloo, me disait également si ma consommation d’écran était raisonnée. Je conseille vraiment de ne pas utiliser son smartphone le soir. Je l’ai déjà fait dans des cas exceptionnels, et ce n’est pas bon car on reste trop de temps dessus. Ça a un impact sur la qualité de notre sommeil, je l’ai vraiment ressenti. »

« J’ai 13 ans et je veux m’inscrire sur les réseaux »

L’idée de génie

👌 Accepter que mes parents supervisent
S’ils jettent un œil à ce que tu postes ou ce à quoi tu joues, c’est pour ton bien : parfois, on ne se rend pas compte des risques… même à plus de 13 ans.
👌 Mettre mes comptes en privé
C’est une super technique pour éviter que des personnes malveillantes aient accès à ta vie perso. Accepte uniquement des demandes d’amitié venant de personnes que tu connais bien.
👌 Savoir que tout n’est pas vrai
Sur les réseaux, beaucoup de fausses infos circulent et les gens ont tendance à embellir leur vie en ne montrant que le positif. Alors surtout, ne te compare pas !

Le mauvais bail

👎 Donner mes infos personnelles
Dès qu’une application ou une personne te le demande, renseigne ton nom, ton adresse et ton âge. Comme ça, on pourra te retrouver hyper facilement !
👎 Poster n’importe quoi
Réfléchir avant de publier une photo ou un commentaire, ça enlève toute spontanéité. Tant pis pour les conséquences…
👎 Participer à tous les défis tendance
Trop rigolotes, les trends TikTok ! Je les reproduis toutes, et même les plus dangereuses. Après tout, il faut savoir prendre des risques pour être tendance.

Le super conseil de Lola, 15 ans
« Pour celles et ceux dont les parents ne veulent pas qu’ils aient leur propre chaîne YouTube, j’ai une suggestion : c’est ce que je faisais quand j’étais plus petite. Je filmais des vidéos, mais au lieu de les poster, je les gardais pour moi, ou je les montrais juste à mes parents. Comme ça, j’avais quand même ce plaisir de créer des films ! »

Psychologue et psychothérapeute, Aline Nativel Id Hammou, répond à 3 questions d’Okapi.

Pourquoi a-t-on besoin d’indépendance à l’adolescence ?

« C’est un âge où l’on a besoin de tester des choses, de faire ses propres expériences, et même, dans une certaine mesure, de réaliser des erreurs pour apprendre à se connaître et à se projeter dans l’avenir. C’est important pour développer sa personnalité et son autonomie, pour se distancier de ses parents. »

À l’adolescence, c’est compliqué avec les parents. Pourquoi ?

« Parce que pour eux, voir son enfant grandir n’est pas simple. Il faut comprendre que pour beaucoup, c’est une forme de deuil ! Ils ont l’impression de perdre leur « bébé », craignent de ne plus avoir la même complicité avec leur enfant, les mêmes centres d’intérêt. Et aussi que leur enfant se mette dans des situations compliquées, dangereuses. »

Comment gagner quelques libertés malgré tout ?

« Tu dois prouver à tes parents qu’ils peuvent te faire confiance. Pour cela, il faut toujours communiquer, en étant honnête, et surtout faire des compromis, pour que chacun y trouve son compte. Beaucoup de parents attendent aussi de la reconnaissance. Alors, il faut penser à les remercier, à les valoriser, leur dire que tu les aimes… Il doivent sentir qu’ils restent importants pour toi. »

“Mes premières libertés : mode d’emploi”, article extrait du magazine Okapi n° 1224, 15 juin 2025. Texte : Célie Dugand. Photos d’ados : Patrice Eglin. Merci à Alice, Joachim, Madeleine et Sascha.